Par un arrêt du 25 juin 2013, la Cour de cassation affirme pour la première fois que la cession d'un fichier clients est nulle pour illicéité de l'objet de la vente dès lors qu'il n'a pas été déclaré à la CNIL. Au-delà des sanctions pénales en cas de non-respect de telles formalités, cette nouvelle sanction doit inciter les opérateurs à être en conformité avec leurs obligations en matière de données personnelles.
Une société qui exploitait un fonds de commerce de vente de vin aux particuliers a cédé son portefeuille de clientèle composé d'un fichier informatisé et d'une ligne téléphonique. Ce portefeuille comprenait une liste d'environ 6 000 clients référencés dans un fichier manuscrit et dans un fichier informatisé. L'acquéreur souhaitant se voir rembourser les sommes versées lors de cette cession a contesté la validité de la vente du fichier clients en se fondant notamment sur le défaut de déclaration dudit fichier à la CNIL (Commission nationale de l'informatique et des libertés); Il soutenait ainsi que la cession du fichier encourait la nullité dès lors que l'objet de la vente était illicite en raison du défaut de déclaration du fichier auprès de la CNIL. Débouté par la cour d'appel de Rennes, l'acquéreur a obtenu gain de cause devant la Cour de cassation.
Selon la Cour de cassation "en statuant ainsi, alors que tout fichier informatisé contenant des données à caractère personnel doit faire l'objet d'une déclaration auprès de la CNIL et que la vente d'un tel fichier qui, n'ayant pas été déclaré, n'était pas dans le commerce, avait un objet illicite, la cour d'appel a violé les textes susvisés". Après avoir constaté que tout fichier contenant des données à caractère personnel doit être déclaré à la CNIL et que le défaut de déclaration constitue une infraction pénale, la Cour de cassation en tire comme conséquence qu'un tel fichier non déclaré est hors commerce et donc insusceptible d'être vendu.
Il n'a pas échappé à la Cour de cassation qu'aujourd'hui l'exploitation commercial des données à caractère personnel et plus particulièrement celles contenues dans les fichiers clients des entreprises ne cesse de croître et qu'elles font l'objet de nombreuses convoitises dans la mesure où elles représentent désormais un enjeu financier important pour les entreprises notamment dans l'économie numérique (la problématique Big Data). La Cour de cassation, face aux dangers d'une extension de cette exploitation commerciale incontrôlée, "innove" avec une sanction retirant à ces données à caractère personnel toute commercialisation si elles ne font pas l'objet d'une déclaration auprès de la CNIL et incite ainsi davantage les entreprises à se conformer aux formalités auprès de la CNIL.
Ainsi, outre le risque de poursuite administrative et/ou pénal, les opérateurs économiques défaillants peuvent craindre de voir leurs fichiers clients non déclarés devenir incessibles privant alors ces derniers de toute valeur marchande.
Source : Paroles d'experts - Octobre 2013
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