Les Echos du 20/02/2012
Pour contacter leur banque, les détenteurs de compte chez BNP Paribas adeptes des réseaux sociaux n'ont que l'embarras du choix. Rien que sur Twitter, ils ont accès à deux fils. L'un (@bnpparibas_com) a plutôt une vocation informative. L'autre (@bnpparibas_sav) joue les services après-vente.
« Nous ne voulons pas imposer un moyen de communication à nos clients. Il est donc important pour nous d'être très présents sur les réseaux sociaux et de mener une veille sur les questions susceptibles d'y surgir. Si quelqu'un signale sur Twitter que sa carte bancaire ne fonctionne plus à New York, nous pouvons intervenir en direct et débloquer la situation », souligne Virginie Fauvel, directrice de la banque en ligne chez BNP Paribas. Evidemment active sur Facebook, la marque vient aussi de se lancer sur Foursquare et
« regarde » Google+.
Si la banque a intégré tôt les réseaux sociaux dans sa stratégie de relation client, le mouvement n'en est encore qu'à ses débuts dans beaucoup de groupes.
« Les entreprises ont pris conscience des besoins, mais beaucoup n'en sont encore qu'à la phase d'écoute sur ce que l'on dit d'elles. En revanche, elles ont compris qu'il s'agissait d'un vrai changement de culture », estime Laurent Dupuytout, « partner » chez EI-Technologies. Le groupe de conseil et de services en système d'information reçoit de plus en plus de demandes liées au Customer Relationship Management (CRM) incluant un volet sur les réseaux sociaux.
La bonne utilisation de ces derniers réclame en effet de faire évoluer son organisation. Ne serait-ce que pour s'adapter à l'instantanéité des flux.
« Twitter permet une remontée en temps réel de l'insatisfaction d'un client mais implique aussi une rapidité de réaction. L'enjeu est d'autant plus fort que si l'on répond à une plainte, on accroît fortement la fidélité du consommateur », souligne Christine Balagué, titulaire de la chaire réseaux sociaux à l'Institut Télécom (Télécom Ecole de management). Créée l'an dernier, cette chaire comprend un volet de recherche portant sur la gestion de la relation client.
Le nerf de la guerre, c'est donc de se montrer réactif dans des plages horaires larges. Le fil Twitter que voyages-sncf.com dédie au suivi des questions sur un achat ou à la résolution des difficultés rencontrées pour retirer une réservation (@clt_voyagessncf) est ainsi actif de 8 heures à 21 heures, 7 jours sur 7.
Besoin de coordination
L'autre enjeu, de taille, consiste à impliquer l'entreprise dans son ensemble.
« De plus en plus de personnes y sont exposées à la relation client », remarque Laurent Dupuytout. Ce qui nécessite d'améliorer la coordination.
« L'important est de fédérer le marketing, la communication et le service client », souligne Yan Saunier, président et cofondateur de JeeMeo, éditeur de logiciels de « social CRM ».
Le développement de la présence de Mustela sur les réseaux sociaux, en particulier Facebook, a ainsi conduit la marque de soins pour bébés à revoir son organisation.
« Avant, nous raisonnions plutôt en silo. Dorénavant, nous disposons d'un seul pôle centré sur le consommateur », soulignait Sybille Foing, responsable marketing de Mustela France, lors du premier Forum annuel de la relation client organisé par Les Echos Conférences et l'AFRC.
Ce besoin de coordination n'empêche pas que, en première ligne, on trouve d'abord le ou les « community managers ». Au sein de BNP Paribas, l'équipe CRC 2.0 (centre de relation client 2.0) compte une dizaine de personnes.
« Ce sont des banquiers, aguerris aux règles de notre secteur mais également formés pour écrire dans le style propre aux réseaux sociaux. Notre stratégie est de tout traiter en interne car c'est au coeur de notre métier », juge Virginie Fauvel.
Mais il arrive aussi qu'une marque favorise l'esprit de forum.
« Dans la high-tech, les consommateurs experts apprécient de mettre en avant leurs connaissances. Une marque peut les laisser répondre au poste d'un autre membre, avant, éventuellement, d'apporter son propre point de vue », remarque Yan Saunier de JeeMeo, qui travaille notamment pour Sony Ericsson.
La manière d'aborder la relation client doit de toute façon s'affiner selon les réseaux, de la limite des 140 signes sur Twitter, qui oblige parfois à finir l'échange par mail, au caractère plus émotionnel de Facebook. Et les marques vont devoir réfléchir à la bonne manière d'être accessibles, via les nouveaux services comme Google+ ou Pinterest.
« Il faut se montrer innovant en permanence pour garder ce qui représente aujourd'hui un véritable avantage concurrentiel », prévient Christine Balagué. D'autant que les temps d'adaptation se raccourcissent. Le Livre blanc sur le « social CRM » publié par Atos Consulting et Publicis Consultants-Net Intelligence estime que la
« révolution en cours autour du "social CRM" prendra de deux à trois ans au maximum » pour devenir une pratique partagée par la majeure partie des entreprises. Alors qu'il a fallu cinq ans pour avoir une approche multicanal incluant Internet.
Mais le plus dur reste certainement à venir : intégrer réellement les informations issues des réseaux sociaux aux autres bases de données de l'entreprise. Si peu de groupes en sont déjà là, ils sont de plus en plus nombreux à y travailler.
Des débuts timides dans la vente en ligne
Comment les spécialistes de l'e-commerce, de l'e-tourisme et de la banque-assurance en ligne utilisent-ils les réseaux sociaux ?
• 31 % des entreprises prévoient d'utiliser Facebook ou Twitter dans une logique de service client en 2012.
• Les réseaux sociaux ne représentaient que 1 % des interactions avec les clients en 2011. Mais les sociétés pensent qu'elles passeront à 4 % d'ici à cinq ans.
• Dans un tiers des cas, la cellule réseaux sociaux est chapeautée par le département marketing, dans un cas sur cinq par le département relation client. Elle est aussi souvent rattachée à plusieurs directions.
Source : étude « Vente en ligne et digitalisation de la relation client » de CCM Benchmark pour CCA International et la Fevad.